Montréal: augmentation des contestations d’évaluation municipale

L’évaluateur municipal procède au maintient de l’inventaire des immeubles sur son territoire pour en déterminer sa valeur réelle, c’est-à-dire sa valeur marchande pour fins de taxation.

L’évaluation des biens-fonds est le registre qui contient la valeur réelle des immeubles dans une ville. Le rôle d’évaluation fournit la base du partage de la charge fiscale entre les propriétaires. Il va sans dire qu’un immeuble surévalué fait subir aux propriétaires une charge fiscale plus élevée qui se reflète dans son compte de taxes municipales et scolaires.

Tous les trois ans, chaque ville ou municipalité procède à une évaluation des propriétés sur son territoire. Cette évaluation est généralement effectuée par échantillonnage, en se basant sur un découpage du territoire, sans tenir compte des particularités de chacun des immeubles qui s’y trouve.

À Montréal, chaque trois ans, le nouveau rôle d’évaluation foncière est déposé. Les comptes de taxes sont donc calculés à partir de cette nouvelle évaluation. L’augmentation de la valeur foncière des propriétés est sur trois ans par l’administration municipale, afin de répartir la hausse, laquelle, selon les différents paramètres d’évaluation et des fluctuations du marché, peut affecter votre compte de taxe.

À Montréal, un nouveau rôle fut déposé en septembre 2010, pour les années 2011-2012-2013.

La loi sur la fiscalité municipale prévoit certains mécanismes permettant aux propriétaires de porter plainte s’ils jugent erronée la valeur de leurs immeubles. Pour se faire, un propriétaire peut mandater un évaluateur agréé pour déterminer la valeur marchande de l’immeuble selon la Loi sur la fiscalité municipale.

Les évaluateurs agréés (ou, du moins plusieurs d’entre eux) sont spécialisés en contestation de l’évaluation municipale. Ils peuvent préparer une étude justificative de la valeur marchande d’un immeuble et témoigner, le cas échéant, devant le Tribunal administratif du Québec.

Il faut entrevoir trois étapes pour contester son évaluation foncière.

LA PREMIÈRE : Demande de vérification. Il s’agit habituellement d’une rencontre « amicale » mais convaincante avec les évaluateurs. L’évaluateur peut, d’office, faire une proposition à l’effet de modifier, d’ajouter ou de supprimer une inscription au rôle.

LA DEUXIÈME: Demande de révision (art.124 à 138.4 de la Loi sur la fiscalité municipale). Une personne qui a un intérêt à contester l’exactitude, la présence ou l’absence d’une inscription au rôle relative à un bien dont elle-même ou une autre personne est propriétaire peut déposer auprès de l’organisme municipal responsable de l’évaluation une demande de révision à ce sujet. Donc, dans un premier temps, si vous décidez de contester cette hausse, vous devez déposer, avant le 1er mai de l’année du rôle, une demande de révision à la Direction de l’évaluation foncière de la Ville de Montréal. Les demandes de révision déposées après le 1er mai ne seront pas acceptées. Par contre, si durant les trois années de l’application de l’évaluation un événement survient qui entraîne une baisse de la valeur de votre propriété (par exemple, un incendie, un dégât d’eau, etc.), vous pourriez déposer une demande en tout temps. Il faut aussi que vous sachiez que même si vous déposez une demande de révision, vous êtes tenus de payer votre compte de taxes dans les délais prévus. Si une décision est prise en votre faveur concernant votre demande de révision, la Ville vous remboursera (avec intérêt, s’il y a lieu) le montant de taxes payé en trop. Votre demande de révision déposée et reçue, un évaluateur de la Ville étudiera votre dossier et évaluera les raisons que vous invoquez pour justifier la baisse de la valeur de votre propriété dans le rôle d’évaluation foncière en vigueur. La décision de l’évaluateur, en votre faveur ou non, doit normalement être rendue au plus tard le 1er septembre de la même année; cependant, cette année, la Ville de Montréal a obtenu une prolongation de ce délai jusqu’au premier novembre, en raison du nombre élevé de dossiers.

LA TROISIÈME : Recours devant le Tribunal administratif du Québec (TAQ)(art. 138.5 à 150) . 2/3 des dossiers y sont réglés. Cette demande de révision doit être, elle, déposée dans les 31 jours suivant la réception de la décision de la Direction de l’évaluation foncière. Dans ce cas, c’est le Tribunal qui étudiera votre cause, qui entendra les deux parties et c’est le juge qui rendra le verdict. En d’autres mots, la Direction de l’évaluation foncière refuse de vous accorder une diminution de la valeur foncière de votre propriété ? Vous refusez toujours de débourser le montant de votre compte de taxes ? Vous pouvez poursuivre votre démarche de contestation en formulant une autre demande de révision mais, cette fois-ci, devant le Tribunal administratif du Québec.

Dans des cas assez rares, lorsque le juge refuse une réévaluation de votre propriété, vous pouvez porter la cause en appel à la Cour du Québec. Cependant, pour le faire, le juge ayant traité votre dossier doit vous permettre d’aller en appel.

Selon les informations obtenues de la Ville de Montréal, le nombre de contestations s’est élevé à 6804 dans l’île de Montréal, pour le nouveau rôle triennal de 2011 à 2013. La valeur foncière des immeubles en litige atteint 16,5 milliards de dollars, sur un parc montréalais évalué au total à 242,1 milliards.

Toujours selon les informations obtenues auprès de la Ville de Montréal, la valeur accolée aux propriétés a grimpé en moyenne de 23,5% depuis le rôle de 2007, mais la hausse est plus forte dans plusieurs secteurs.

Pour le présent rôle, 4520 propriétaires résidentiels ont contesté la valeur de leur évaluation (d’une valeur globale de 4,39 milliards), contre 2284 détenteurs d’immeubles non résidentiels (évalués à 12,1 milliards).

Au dernier rôle de 2007, on dénombrait 435 000 immeubles résidentiels, commerciaux et institutionnels dans l’île de Montréal, évalués à 187,6 milliards. Au moins 25 000 unités se sont ajoutées depuis, pour un total de 460 394 édifices au moment où le rôle de 2011 a été calculé (il y a déjà 2 ans). La valeur de tous ces biens immobiliers a bondi de 54,5 milliards, à 242,1 milliards.

Même les propriétaires du Canadien de Montréal ont finalement décidé de contester la nouvelle évaluation municipale du Centre Bell. Les frères Molson et leurs partenaires ont attendu jusqu’à la dernière minute pour s’opposer au rôle d’évaluation 2011, qui attribue une valeur de 276 millions $ à l’amphithéâtre montréalais. L’augmentation de la valeur du Centre Bell est beaucoup plus élevée que la hausse moyenne de 20,2 %, enregistrée par les immeubles non-résidentiels. La Ville de Montréal a haussé la valeur du bâtiment de 60 millions $ pour le rôle d’évaluation 2011-2012-2013. Il s’agit d’une progression de près de 30 %, par rapport au dernier rôle publié en 2007. Il faut toutefois garder à l’esprit que le Centre Bell fut construit en 1996 pour 240 millions de dollars!

L’évaluation foncière de Place Ville-Marie a bondi de 18 %, par rapport à 2007, alors que celle de l’édifice du 1000 De La Gauchetière, situé à quelques pas du Centre Bell, a grimpé de seulement 10 % pendant la même période.