La mise en oeuvre, c’est la clé

Le dialogue structuré ouvre la porte à une gamme élargie de remèdes. Toutefois, il faut s’assurer que le remède choisi se concrétise.  La concrétisation du remède fait partie du jeu dès le départ de sorte que le jeu n’est pas terminé avant que les parties ne se retrouvent avec des gains concrets dans les mains.

Le remède normal est le paiement d’une somme d’argent contre valeur et c’est le remède légal. Dans un dialogue, le remède admis peut être la performance, par exemple la livraison d’une oeuvre contre quittance. En matière d’infrastructure, la voie légale exige l’appel d’offres et l’acceptation du plus bas prix soumis.

La présidente de l’Ordre des ingénieurs, Maud Cohen, dans un reportage de Vincent Larouche de La Presse du 5 août 2011, souligne l’importance sur le plan pratique de trouver un remède équitable. « Il faut arrêter de vouloir les choses au plus bas coût. Surtout à l’heure où nous sommes en train de reconstruire toutes ces infrastructures, il ne faut absolument pas négliger la phase de la conception. »

La mise en oeuvre d’une solution équitable exige de la collaboration de la part de tous les joueurs. Dans le cas d’un dialogue entrepris à cause d’un conflit, par exemple à la suite de l’effondrement d’une structure, la collaboration s’installe progressivement dès le début par la confection même des règles du jeu afin d’arriver à la solution équitable. La collaboration se poursuivra jusqu’à la mise en oeuvre de la solution.

On en est rendu, supposons, au stade de la prise de décision. On a décidé, par exemple, de faire construire un centre administratif et de le livrer clés en main contre quittance. Comment procéder pour la mise en œuvre? Dans un premier temps, le promoteur réalisateur convoque tous les intéressés : le bailleur de fonds (la compagnie d’assurances), le client c’est-à-dire toujours dans mon exemple les élus, les sages de la communauté et l’ingénieur en chef sans oublier le surintendant des travaux et l’entrepreneur général choisis par les parties.

Les intéressés s’assoient à la table pour concevoir l’œuvre, arrêter les plans et devis en tenant compte de tous les coûts, y compris les frais d’administration et même le profit de l’entrepreneur général, et préparer le chemin critique ainsi que l’échéancier. Par la suite, les intéressés examinent ensemble le projet en supputant les risques. Il leur faut d’abord identifier ces risques et décider des mesures à prendre soit pour les éviter, soit pour les gérer. La réalisation commence et les intéressés font le suivi, jusqu’à l’acceptation de l’œuvre et jusqu’à ce que mission soit accomplie.

Le résultat en l’occurrence: œuvre de première qualité livrée et acceptée à des coûts abordables (2 000 000 $ plutôt que les 9 000 000 $ de l’estimation avant la démarche en dialogue), dans un délai raisonnable, et avec les gains recherchés par tous les intéressés, y compris le profit attendu par l’entrepreneur général. Ce résultat reflète un changement de culture, d’une culture de domination à une culture de coopération donnant ouverture à la saine gestion.

Le 22 juin 2011, La Presse et The Gazette se sont portés promoteurs réalisateurs pour mettre fin à « Une situation intolérable … En raison des embouteillages monstres causés par le mauvais état des infrastructures routières dans la région de Montréal ». Cette initiative donne l’espoir que le souhait de la présidente de l’Ordre des ingénieurs pourrait se réaliser. Tous les joueurs sont présents, y compris les utilisateurs et les autochtones : « La fermeture soudaine de deux voies du pont Mercier a mis en évidence la fragilité du réseau routier de la région métropolitaine de Montréal ». Je rappelle la pièce de théâtre « Sexy Béton » d’Annabel Soutar et ses propos dans The Gazette du 5 août 2011 « What can you do about this road mess? »

Il semble que l’initiative de La Presse et The Gazette va bon train. Les gouvernements sont de plus en plus transparents. Il s’agit maintenant pour les professions d’aligner leurs energies et de participer dans ce jeu de grande collaboration. Quelle belle occasion pour la collectivité de mettre en œuvre sa sagesse et ses connaissances et, pour les professions, de s’affirmer et se voir valorisées par la collectivité. En voulant se donner une meilleure infrastructure, il faut se donner une structure sur mesure pour les fins de la mise en oeuvre, soit un dialogue structuré.