L’invasion approche?

Je lisais récemment certains articles qui prédisaient la venue prochaine des experts américains en recours collectif au Canada et j’avais l’impression de déjà-vu. La rumeur à cet effet est presque cyclique. À intervalles réguliers, on ramène le sujet en laissant sous-entendre que l’invasion est imminente et que nous serons prochainement submergés de recours américains « canadiennisés ». Selon moi, il n’en est rien. Plusieurs facteurs m’amènent à cette conclusion.

D’abord, contrairement à ce que certaines mauvaises langues aiment véhiculer, pratiquer en demande au Québec en matière de recours collectif n’est pas une mince affaire. À cet égard, notre province est choyée de pouvoir compter sur bon nombre d’avocats talentueux qui pratiquent dans le domaine et représentent habilement les membres des divers recours collectifs intentés. On est très loin d’une situation où il existe un besoin marqué d’importation de l’expertise américaine sur la question. Les avocats d’ici sont plus qu’aptes à faire le travail.

Deuxièmement, la vague de ce que l’on appelle communément les recours collectifs « copycat » a déjà déferlée sur le Québec et le reste du Canada. Elle a été beaucoup moins importante que plusieurs ne le prédisaient. Certes, l’on voit occasionnellement des recours qui sont le pendant de recours américains identiques, mais c’est une minorité. La grande majorité des recours collectifs reste basée sur des violations alléguées des lois québécoises en matière de consommation, de droits civils ou de protection de l’environnement. Il s’agit de matières foncièrement locales.

Troisièmement, nul besoin pour les avocats américains de venir au Canada ou au Québec quand ils peuvent inclure des résidents canadiens dans leurs procédures américaines. En effet, les demandeurs américains sont de plus en plus agressifs quant aux groupes qu’ils tentent de représenter dans les divers états américains, rendant ainsi le dépôt de recours dans d’autre juridictions moins souvent nécessaire.

Ainsi, si le monde des recours collectifs québécois prend de l’ampleur dans les années à venir, je suis raisonnablement certain que ce sera en raison du dynamisme du barreau local et pas en raison d’une invasion massive de nos voisins du sud.