Un recours collectif autorisé peut-il être irrecevable?
En cette journée Nationale des Patriotes et Fête de la Reine, je vous offre un court billet sur la possibilité pour une partie défenderesse de présenter une requête en irrecevabilité à l’encontre d’un recours collectif déjà autorisé. À cet égard, un courant jurisprudentiel et doctrinal suggérait il y a quelques années qu’un recours collectif autorisé ne devrait pas pouvoir faire l’objet d’une requête en irrecevabilité, le juge à l’autorisation ayant déjà testé le sérieux du recours et ses chances de succès.
Ce courant a cependant été mis de côté par la jurisprudence récente. L’affaire Tanguay c. Hydro-Québec (2011 QCCS 2377) offre une belle illustration de ce principe.
Dans cette cause, la Défenderesse demande le rejet du recours collectif intenté contre elle et qui a été autorisé par jugement rendu le 15 février 2007. Ce recours collectif met en cause la responsabilité civile contractuelle de la Défenderesse dans le cadre d’un régime d’assurance-vie collective supplémentaire. Ce recours collectif recherche plus particulièrement deux réparations de nature distincte pour compenser les hausses substantielles de primes imposées aux membres non syndiqués des deux sous-groupes ainsi que le préjudice fiscal subi par ceux-ci en raison, selon le Demandeur, des violations par la Défenderesse de ses obligations contractuelles. Or, le Demandeur s’objecte de manière préliminaire à la requête, faisant valoir qu’on ne peut demander l’irrecevabilité d’un recours déjà autorisé.
L’Honorable juge Gérard Dugré rejette cette prétention et souligne qu’une fois autorisé, le recours collectif est soumis aux règles usuelles:
[24] L’arrêt de la Cour d’appel rendu dans Popovic c. Montréal (Ville de) oblige le Tribunal à répondre négativement à cette question en litige. Dans cet arrêt, la Cour d’appel confirme la possibilité de présenter un moyen d’irrecevabilité après l’autorisation du recours collectif et réaffirme le devoir de prudence imposé au Tribunal afin d’éviter de mettre fin à un procès sans examen au mérite. […]
Bien sûr, pratiquement parlant, il serait très surprenant de voir une requête en irrecevabilité être accueillie en l’absence de faits nouveaux ou d’une preuve nouvelle faite après l’autorisation puisque le tribunal aura déjà déterminé que le syllogisme juridique rencontre le test prima facie au stade de l’autorisation. Ce sera donc habituellement après la tenue d’un interrogatoire préalable que l’on recherchera le rejet préliminaire du recours.
Reste qu’il est faux de prétendre qu’un recours collectif, une fois autorisé, devra nécessairement être décidé au mérite.
Le texte intégral du jugement est disponible ici: http://bit.ly/j2Yf7g