État d’urgence sanitaire et contrat de gré à gré : la mise en garde de l’AMP
Avez-vous récemment décidé d’attribuer un contrat de gré à gré sur la base du décret qui déclare l’état d’urgence sanitaire au Québec ?
Dans l’affirmative, vous avez intérêt à lire une décision récente de l’Autorité des marchés publics (AMP).
Dans sa décision, l’AMP fait référence aux « grands principes de l’article 2 de la LCOP » : l’évaluation préalable des besoins adéquate et rigoureuse, la bonne utilisation des fonds publics, etc. Ces principes sont généralement invoqués dans le cadre d’un appel d’offres, mais, selon l’AMP, demeurent applicables dans le cadre d’un contrat de gré à gré. Malgré l’assouplissement aux règles de gestion contractuelle autorisé par le décret (voir un billet précédent), les organismes publics doivent donc surveiller adéquatement leurs processus contractuels. Ils doivent notamment, avant de conclure un contrat, faire des vérifications pour s’assurer que les produits qu’ils veulent acheter répondent à certaines normes visant à attester de leur qualité. Pour citer l’AMP, malgré le contexte actuel, il y a une nécessité « que les acquisitions en biens et en services continuent de se faire en adéquation avec les besoins de l’organisme public » et que les organismes publics assurent « une saine gestion des deniers publics ».
Dans cette décision, l’AMP fait aussi une mise en garde relativement à la conclusion de contrats de gré à gré dans le contexte de l’état d’urgence sanitaire. Elle souligne en effet que les organismes « peuvent se trouver en position de vulnérabilité face à un marché qui peut se révéler agressif » et qu’ils doivent par conséquent « en être conscients, considérer les nouveaux risques associés à un contexte de pandémie, et demeurer attentifs aux processus contractuels qu’ils entreprennent ». Ces commentaires de l’AMP reprennent essentiellement la mise en garde de notre billet précédent.
Autre aspect abordé dans cette décision : l’identification des contrats à être attribués de gré à gré sur la base du décret. L’AMP convient qu’un organisme a une certaine discrétion à ce sujet. Cependant, pour citer l’AMP, cette discrétion « est limitée à la protection de la santé de la population ». Traduction ? Un organisme qui invoque le décret pour conclure un contrat de gré à gré doit être en mesure de démontrer un lien suffisant entre l’objet du contrat et l’objectif de protéger la population dans le contexte de l’épidémie de COVID-19. Cette mise en garde est particulièrement pertinente considérant qu’une association qui représente l’industrie des technologies médicales a, récemment, ouvertement reproché aux organismes du réseau de la santé d’avoir profité du décret pour contourner la LCOP dans certains cas. Il ne serait donc pas étonnant que l’AMP se penche sur cette question sous peu.