« Meilleurs efforts raisonnables » : quelle interprétation?

La campagne de vaccination contre le coronavirus (COVID-19) s’accélère et, dans cette optique, la livraison de doses de vaccin constitue bien sûr le nerf de la guerre.

En mai dernier, l’Union Européenne (UE) a ainsi accusé le fournisseur AstraZeneca de « violation flagrante » du contrat d’approvisionnement conclu entre les parties. Elle lui a reproché de ne pas avoir déployé les « meilleurs efforts raisonnables » (« best reasonable efforts », selon le contrat) pour respecter le calendrier de livraison convenu. Devant un tribunal belge (ce contrat d’approvisionnement étant assujetti au droit belge), elle a plaidé qu’AstraZeneca n’a pas mobilisé le maximum de ses capacités de production pour approvisionner en doses de vaccin les membres de l’UE. Le sujet est évidemment très sensible, puisque tout retard dans les livraisons ralentit la campagne de vaccination.

Au mois de juin, le tribunal belge a rendu sa décision : il a ordonné à AstraZeneca de livrer 50 millions de doses de vaccin d’ici au 27 septembre 2021 (15 millions de doses d’ici au 26 juillet 2021 ; 20 millions de doses d’ici au 23 août 2021 et 15 millions de doses d’ici au 27 septembre 2021). De plus, en cas de non-respect des délais de livraison, AstraZeneca devra payer une pénalité de 10 euros par dose non livrée. Au sujet de l’interprétation de la clause des « meilleurs efforts raisonnables », le tribunal a jugé qu’AstraZeneca aurait dû tout mettre en œuvre pour livrer les doses de vaccin selon le calendrier convenu, y compris en mobilisant les sites de production expressément mentionnés dans le contrat, et qu’elle a donc gravement manqué à ses obligations contractuelles envers l’UE (dans sa décision, il parle même de « faute lourde »).

Bien que cette décision soit assurément une bonne nouvelle pour l’UE, il s’agit néanmoins d’une victoire en demi-teinte selon plusieurs observateurs. En effet, d’une part, le nombre de doses de vaccin à livrer par AstraZeneca selon l’ordonnance du tribunal (50 millions de doses) est largement inférieur aux demandes de l’UE (90 millions de doses), et d’autre part, la pénalité qui a été prévue est de 10 euros par dose non livrée, plutôt que de 10 euros par dose non livrée et par jour de retard, comme le demandait l’UE (autrement dit, une seule pénalité de 10 euros par dose non livrée sera appliquée en cas de non-respect des délais, quel que soit le retard).

Par ailleurs, le litige entre les parties ne va probablement pas s’arrêter là puisque l’UE a parallèlement engagé une autre action en justice contre AstraZeneca visant à lui réclamer une compensation financière pour les retards de livraison.