Essais et erreurs des spécifications techniques et des essais de conformité : comment prévenir des situations embarrassantes pour les organismes publics?

Suite aux dernières modifications réglementaires, le 1er juin 2016, régissant les appels d’offres des organismes publics soumis à Loi sur les contrats d’organismes publics, l’obligation de valider les spécifications techniques ou les essais de conformité lorsque requis a été précisée dans le Règlement sur les contrats d’approvisionnement de certains organismes publics (« RCAOP ») et le tout nouveau Règlement sur les contrats des organismes publics en matière de technologie de l’information (« RCOPTI »).

En bref, l’article 12 du RCAOP et l’article 26 du RCOPTI indiquent que, lorsque la documentation d’appel d’offres prévoit des essais de conformité à l’égard des biens, ces essais ne sont effectués que pour les biens présentés par ce soumissionnaire et non pas pour les deux ou trois premiers soumissionnaires. De plus, le non respect des spécifications techniques ou des essais de conformité des biens entraînent désormais le rejet automatique de la soumission (article 7 (5°) du RCAOP et article 8 (6°) du RCOPTI), ne laissant plus aucune discrétion à l’organisme public.

Cette situation ne serait autrement aussi préoccupante si la Cour d’appel n’avait pas récemment rendu une décision quant aux méthodes acceptables de vérification de la conformité. En effet, celle-ci a décidé que l’organisme peut très bien s’en remettre aux soumissionnaires eux-mêmes pour attester de la conformité des biens que ceux-ci proposent en réponse à l’appel d’offres.

Évidemment, on peut prendre pour acquis que, dans la très grande majorité des cas, le bien sera effectivement conforme lors de l’exécution du contrat. Toutefois, l’histoire tend à nous prouver que tout ne se déroule pas toujours sans heurts. En l’absence de véritables essais de conformité, qu’adviendra-t-il si le bien du soumissionnaire retenu s’avère ne pas être à la hauteur des spécifications du devis technique? Le résultat pourrait aussi être le même si l’organisme s’en est remis aux soumissionnaires pour attester de leur propre conformité. N’ayant aucune obligation de procéder à l’attestation de la conformité d’un autre soumissionnaire, l’organisme public pourrait se retrouver à court d’options, et fort probablement devoir reprendre le processus par un nouvel appel d’offres.

La possibilité bien réelle qu’une telle situation survienne amène à se demander s’il ne serait pas préférable que les organismes publics, même en l’absence de dispositions réglementaires à cet effet, se dotent d’un filet de sécurité. Il serait plus prudent d’attester la conformité d’un ou deux soumissionnaires additionnels et prévoir dans la documentation d’appel d’offres deux choses importantes :

  • une période contractuelle de probation pour l’adjudicataire (exemple 30 à 60 jours);
  • une durée de validité des autres soumissions dont la conformité technique a été validée, au-delà de cette période de probation.

Agir ainsi permettrait de maintenir en vie le processus initial de l’appel d’offres. Pourquoi ne pas mieux prévenir que guérir, lorsque possible, et ce dans un souci de mieux protéger les intérêts des contribuables?