Estimation de la valeur du contrat : une étape cruciale !

L’estimation de la valeur du contrat est une étape cruciale dans un processus contractuel.

D’une part, elle permet à l’organisme public ou municipal de choisir le mode de sollicitation du marché approprié selon les règles qui lui sont applicables (contrat de gré à gré, appel d’offres sur invitation ou appel d’offres public).

D’autre part, dans certains cas, elle permet à l’organisme de déterminer la marche à suivre à la suite de l’ouverture des soumissions. C’est par exemple le cas lorsque le montant de la soumission est anormalement bas. Une telle situation soulève forcément des questions. Le soumissionnaire a-t-il bien compris le projet ? Peut-il réellement réaliser le contrat à ce prix, selon les conditions des documents d’appel d’offres, sans pour autant mettre en péril la bonne exécution du contrat ? Cette réflexion pourrait ultimement convaincre l’organisme de rejeter cette soumission[1]. À l’inverse, une soumission dont le prix est anormalement élevé pourrait justifier la décision de l’organisme d’exercer la clause de réserve, pour des raisons budgétaires. Cependant, dans les deux cas, l’organisme va prendre sa décision sur la base d’une estimation de la valeur du contrat, d’où l’importance, premièrement, de l’avoir faite de manière rigoureuse et deuxièmement, de l’avoir documentée. Autrement, il s’expose à une contestation du soumissionnaire non retenu !

Dans une décision récente, l’Autorité des marchés publics (AMP) a rappelé l’importance de cette étape en mentionnant que « l’estimation est une référence obligatoire avant, mais aussi pendant le processus d’appel d’offres ». Il est intéressant de noter que l’organisme visé par cette décision a plaidé qu’il ne disposait pas à l’interne de l’expertise nécessaire pour produire des estimations dans le domaine de la construction, mais que cet argument n’a pas été retenu par l’AMP. On comprend donc que l’organisme doit, au besoin, recourir à des professionnels qui connaissent le marché pour procéder à l’estimation.

Dans sa décision, l’AMP fait par ailleurs référence à la Loi sur les cités et villes et au Code municipal du Québec, qui prévoient que « le prix de tout contrat qui comporte une dépense de 100 000 $ ou plus doit, avant l’ouverture des soumissions, le cas échéant, et la conclusion du contrat, avoir fait l’objet d’une estimation établie par la municipalité »[2]. À ce sujet, il est important de rappeler qu’un contrat devrait systématiquement faire l’objet d’une estimation avant d’être conclu, et ce, peu importe son montant. La Loi sur les cités et villes et le Code municipal du Québec font uniquement référence aux contrats qui comportent une dépense de 100 000 $ ou plus, mais, à titre de bonne pratique permettant d’assurer la saine gestion des fonds publics, un organisme municipal devrait toujours procéder à une estimation. Ce commentaire s’applique bien sûr également aux organismes publics.


[1] La réglementation applicable aux organismes publics prévoit un mécanisme détaillé qui doit être suivi pour rejeter une soumission dont le prix est anormalement bas. Elle prévoit notamment qu’il faut tenir compte de « l’écart entre le prix soumis et la valeur estimée de la dépense par l’organisme public, laquelle est confirmée au moyen d’une vérification adéquate et rigoureuse ».

[2] Loi sur les cités et villes, RLRQ, c. C-19, article 477.4 ; Code municipal du Québec, RLRQ, c. C-27.1, article 961.2.