Analyse d’une demande d’équivalence : votre clause est-elle excessive ?

Vous connaissez tous la règle : dans le cadre d’un appel d’offres public, un organisme public ou municipal doit décrire les spécifications techniques « en termes de performance ou d’exigence fonctionnelle plutôt qu’en termes de caractéristiques descriptives ». À défaut de pouvoir le faire, l’organisme doit prévoir que sera considérée conforme toute équivalence à des caractéristiques descriptives. Très souvent, il s’agit du scénario où il fait référence à une marque et/ou un modèle et ajoute immédiatement après la mention bien connue « ou équivalent ».

Dans un tel cas, il est fortement recommandé de prévoir aux documents d’appel d’offres de quelle manière une demande d’équivalence d’un soumissionnaire est évaluée. Autrement, l’organisme risque de se faire reprocher par un soumissionnaire de manquer de transparence ou de juger des demandes d’équivalence de manière arbitraire.

Cependant, qu’en est-il du choix du processus d’analyse de la demande d’équivalence ? L’organisme a-t-il une discrétion illimitée par rapport au choix de ce processus ? L’Autorité des marchés publics (AMP) a abordé cette question dans une décision récente.

Dans cette décision, l’AMP a souligné que, lorsqu’il prescrit le processus d’analyse d’une demande d’équivalence, l’organisme doit « éviter que des soumissionnaires potentiels ne soient dissuadés de soumissionner en raison de la charge de travail additionnelle et des coûts liés à la présentation d’une demande d’équivalence ». Il doit donc s’assurer que le fardeau qu’il impose aux soumissionnaires par rapport à la présentation d’une demande d’équivalence n’est pas trop élevé, car cela pourrait ultimement les dissuader de participer à l’appel d’offres. Il serait bien entendu incohérent, d’une part, de permettre la présentation d’une demande d’équivalence dans le but de favoriser la concurrence, mais d’autre part, de prévoir un processus si contraignant qu’il dissuade les soumissionnaires de participer à cet appel d’offres. Ce n’est certainement pas le résultat recherché par le cadre normatif.

En l’occurrence, dans les documents d’appel d’offres analysés par l’AMP, il était prévu qu’un soumissionnaire devait fournir une preuve d’équivalence de son produit faite par un tiers indépendant. Selon l’AMP, « cette façon de faire implique que les soumissionnaires effectuent des démarches afin de faire reconnaître leurs produits équivalents qui vont au-delà de la présentation de la fiche technique, document qu’ils ont souvent déjà en leur possession ». L’AMP a aussi souligné que, dans ce cas, les soumissionnaires avaient une obligation de fournir un document qu’ils n’auraient autrement eu aucune raison d’obtenir.

Cette décision de l’AMP soulève cependant une question importante pour les organismes. Comment déterminer, au moment de la préparation d’un appel d’offres, si le processus d’analyse d’une demande d’équivalence envisagé est excessif pour les soumissionnaires ? Dans certains cas, l’organisme pourra justifier un processus d’analyse plus exhaustif et l’AMP sera donc probablement plus tolérante. Il sera néanmoins intéressant de lire les prochaines décisions de l’AMP à ce sujet. Chaque cas étant différent, on peut s’attendre à ce que l’AMP considère différents paramètres, tels que la nature du contrat, le profil des joueurs dans ce marché, la taille du marché, etc. pour évaluer si le processus prévu par l’organisme est réellement excessif dans ce contexte et restreint la concurrence.